Bureaux Young

Ambiance

La pièce était aussi sombre que les pensées de celui qui s’y tapissait.

Le regard perdu dans les lumières de la ville plus bas, il restait immobile dans un silence de mort.

Qu’attendait-il ? Il ne le savait lui-même…

Cela faisait maintenant une semaine qu’il était revenu sur l’ile… Dans un parfait anonymat.
Il n’avait pas quitté son bureau depuis et le fait que les nuits passent sans
qu’une lumière ne s’allume, et que personne ne sorte de ce bureau dans la
journée pouvait prouver de l’absence de son propriétaire…

Il restait là sans vraiment savoir ce qu’il devait faire… Tout avait été si vite…

Il passa une main sur son visage fatigué et jeta les photos qu’il tenait à la main sur le bureau. Quelque chose l’étouffait, il desserra son col. Peut être était-ce la situation, sa vie, ses découvertes… Quelque chose le rongeait de l’intérieur et il ne pouvait pas se battre… La haine, la tristesse, le dégout. Tout se mélangeait pour ne plus faire qu’un ensemble disparate qui embrumait son esprit…

Il soupira, las, et se mit à jouer avec son alliance. Il lui semblait maintenant que Jacky avait voulu le prévenir.

*Kim sincèrement qu’est ce que tu comptes faire ? Si tu as décidé de ne plus jamais retourner là bas… Alors… Pense à… Te remarier peut être. Ton oncle te ficherait la paix. Il nous a encore collé une inspection sur le dos ce matin.
Il esquissa un sourire et dévisagea longuement son ami.
Il parait qu’il est difficile de se remarier quand on a une alliance au doigt…
Dans ce cas, peut-être devrais-tu l’enlever…
Kim releva la tête vers Jacky, en fronçant les sourcils comme si l’idée même qu’il venait d’énoncer relevait du sacrilège.
Si j’avais voulu la retirer j’aurais divorcé !
Et qu’attends-tu ?
Je ne sais pas… Qu’elle le fasse peut être… ça mettrait fin…
Il secoua la tête.
Ecoute, j’ai encore le droit de mener ma vie comme je l’entends ! Laisse moi seul maintenant.*

Elle l’avait retiré, elle… Si seulement elle n’avait fait que ça…

Il referma les paupières et laissa tomber sa tête en arrière. Il la bascula sur le coté et fixa à nouveau les photos. Elles avaient une emprise presque maléfique sur lui… Il les haïssait et pourtant ne pouvait en défaire le regard.
Elles avaient le même effet que cette couverture de magazine deux semaines plus tôt à New york. Un coup de poignard dans le dos.

*Na-yung entra dans le bureau une mine victorieuse sur le visage. Kim haussa un sourcil. Lorsque cette femme était satisfaite, cela ne pouvait signifier qu’une seule chose. Un ennemi venait tout juste de tomber ou n’allait pas tarder.

Que se passe-t-il ?
Ce n’est pas ce qu’il se passe. C’est ce qu’il s’est passé sans toi surtout !
Il fronça les sourcils, il ne comprenait pas vraiment ce qu’elle essayait de lui dire.

Elle déposa un magazine sur son bureau et s’installa dans un fauteuil plus loin de sa démarche féline.
Il eut un mouvement de recul instinctif en apercevant la photo. «Juliana Young… »

Le pincement au cœur passé, il récupéra le magazine et le début de l’article le frappa en plein cœur.

« Juliana Young, ancienne avocate devenue femme d’affaire depuis son association avec son mari le coréen Kim Young, heureuse maman d’un petit Jae-Min. Un proche de la famille confiait que la mère et l’enfant se portaient à merveille depuis leur sortie de l’hôpital quelques semaines plus tôt…. »

Il étouffait tout simplement. Il releva les yeux vers Na-yung. Elle avait perdu de son arrogance en voyant la réaction de Kim et se demandait maintenant si elle avait eu une bonne idée.

Kim reposa les yeux sur les photos qui accompagnaient l’article. L’enfant lui ressemblait c’était certain. Et les dates coïncidaient, le magazine avait plusieurs mois. Il allait exploser…
Sa respiration s’accéléra. Il essayait par tous les moyens de se calmer… Mais comment se calmer quand on apprend dans un journal à scandale qu’on est père !
Comment pouvait-on faire ça à quelqu’un… C’était la pire trahison pour lui…
Il détourna le regard de ses photos, il n’arrivait pas à se concentrer sur autre chose dans la pièce…La rage l’aveuglait…

Na-Yung se releva…
Kim-ho… Mianhamnida…
Il la fusilla du regard.
Sors d’ici tout de suite !

Elle avait perdu de sa superbe. Elle n’avait plus le regard insolent qu’elle avait lancé à Kim en même temps que ce magazine. Ce regard qui semblait lui dire « voilà ce que c’est de ne pas avoir épousé une coréenne » Il le savait pertinemment Jacky le lui disait assez souvent. S’il y avait bien une personne qui respectait l’oncle de Kim, c’était elle. Car elle n’y avait toujours vu que son profit. Si Kim s’était marié selon les convenances avec une docile jeune fille, elle aurait sans aucun doute terminé dans son lit en tant que maitresse attitrée… Au lieu de cela, la fierté de Kim et son refus d’être dirigé l’avait tout simplement laissé sur le bord du chemin. Elle ne l’avait jamais rencontré, mais elle la détestait déjà cette italo-américaine. Elle lui avait jeté ce magazine à la figure pour lui prouver combien il s’était trompé sur son compte. Et tout ce qu’elle avait réussi à faire c’était briser le cœur du jeune homme… Si tant est qu’il en ait encore un…*

Et pourquoi était-il revenu finalement ? A en juger par tout ce qu’il avait sous les yeux, il n’était plus utile, ni désiré…
Dans la nuit, un de ses hommes lui avait ramené une série de photo sur Juliana. Il l’avait fait suivre depuis qu’il était revenu, un peu plus d’une semaine plus tôt.

*Ici vous avez leur premier rendez vous au Heaven King. Ils ne sont pas arrivés ensemble, mais j’ai eu la confirmation par un serveur qu’ils ont bien passé la soirée ensemble dans un des salons privés.
L’espion étalait ses photos au fur et à mesure sur le bureau, chacune enfonçant un peu plus profondément le poignard.
Ça c’est hier, elle a passé la nuit chez lui. Je ne pouvais pas me rapprocher sans me faire prendre. Elle est arrivée là bas vers 20h et en est repartie peu avant quatre heures à l’aube.
Et là c’est de celui qui était chargé de la surveillance de Choi. C’est lui qui s’est déplacé cette fois. C’était il y a environ six heures. Apparemment il n’a toujours pas quitté la villa…
Il releva la tête vers Kim et apercevant son regard préféra à nouveau baisser les yeux.
Je suis vraiment désolé…
Merci… Sortez maintenant…*

Deux heures qu’il fixait ses photos et qu’il ressassait les paroles du photographe. Mais à quoi s’attendait-il finalement. Elle était restée sans nouvelle de lui pendant plusieurs mois, il ne devait pas espérer autre chose.

Où étaient passées toutes ces promesses ?
*...on a encore trop de choses à vivre ensemble...je veux un enfant de toi...je veux vieillir avec toi...je t'en supplie....je t'en supplie*
Il aurait voulu y croire encore un peu… Mais il n’était plus homme à rêver depuis longtemps… Il avait vécu assez de difficultés ces derniers mois, pour préférer abandonner l’espoir à un autre plus chanceux que lui…

Il se leva encore boitillant à l’aide de sa canne, et s’assit sur le rebord de la fenêtre. Il posa son visage contre la vitre froide et son regard se noya dans les lumières de la ville, plus bas.

Il devait se décider… Partir et ne plus jamais revenir. Ou rester et se battre, au moins pour son fils puisqu’il ne lui restait que lui à présent…

Quelques mois plus tôt

Une voiture sombre roule au pas. Quelqu’un cherche quelque chose…
En cette journée d’été, le parc est envahi par des dizaines d’enfants qui courent et jouent autour du lac.
Une vitre teintée se baisse lentement.

Arrête-toi là.
Un jeune homme, se penche sur le coté pour observer le parc. Il est impossible de lui donner un âge. Ses traits sont marqués par une vie éreintante et mouvementée. Les cheveux plus longs, une barbe naissante, malgré cet air éternellement harassé, il n’a pas encore perdu de sa classe naturelle. Une chose est sûre, il n’est plus celui qui a quitté cette île quelques années plus tôt.

C’est lui… ?
Oui…
Il ne peut s’empêcher de sourire en le voyant.
Il est grand…
Il a cinq ans…
Ça fait si longtemps… ?
Il fronce les sourcils… Il a pourtant l’impression que ce n’était qu’hier… Le temps l’a fui trop vite….

Un soupir d’appréhension et enfin il se décide à ouvrir la portière et descendre de la voiture.
Une longue canne touche le sol avant lui, et il se dresse d’un seul mouvement à l’extérieur. Lentement il s’avance vers un coin du parc un peu isolé. Il se dirige vers un petit garçon qui s’est éloigné d’un groupe.

Bonjour.
L’enfant le fusille du regard d’un air suspicieux
Vous êtes qui ? Maman veut pas que je parle aux étrangers !
L’homme secoue la tête et baisse les yeux comme pris en faute.
Je… Je ne suis pas un étranger… En fait… Je suis un vieil ami de ta maman…
Ça c’est ce que vous dites…
Le jeune homme étouffe un petit rire.
Tu fais bien d’être méfiant… Pourquoi ne joues-tu pas avec les autres enfants ?
Ils m’énervent ! Ils veulent pas m’écouter !
Mais est-ce que toi tu les écoutes ?
Pourquoi faire ? Ma maman elle me dit toujours que c’est moi le chef !
Mais tu sais même les chefs doivent écouter leurs amis.
C’est pas mes amis…

Mr Young ! Que faites-vous ici !
Deux visages se tournent dans un même mouvement. Deux visages étonnamment ressemblants de par leurs traits. Deux visages étirés par la même surprise d’avoir été pris en faute.
Une jeune femme court vers le petit garçon et s’agenouille à ses cotés.
Je croyais vous avoir perdu ! Votre mère m’aurait très chèrement punie vous le savez !
Elle se tourne vers le jeune homme et lui adresse un sourire.
Vous risqueriez de payer cher aussi le fait de vous approcher de ce jeune homme, Monsieur. S’il n’était pas aussi habile à se délester de toute surveillance, vous seriez déjà entouré par son armée de gardes du corps.

Kim ? Il faut y aller…
L’homme se tourne instinctivement reprenant pied dans la réalité. Il acquiesce détournant un regard un peu trop brillant.
J’arrive.

Le jeune homme adresse un sourire triste à l’enfant et ébouriffe ses cheveux avant un dernier signe d’au revoir. Puis s’en va comme il est venu, sa canne rythmant à présent ses pas.

Musique

Kim se redresse brusquement en avant dans un sursaut, suffoquant cherchant son air. Il reste interdit quelques secondes, le temps de reprendre pied dans la réalité, se raccroche à sa table de nuit. Il fronce les sourcils et son regard fuyant fait le tour de la pièce comme pour s’assurer qu’il est bien chez lui.
Le rêve semblait si réel…Mais… Pourquoi ? Son fils ? Impossible…
Il se laisse tomber lourdement en arrière ramenant un bras en travers de son visage.
Une grande inspiration et du bout des doigts il appuie sur l’interphone.
Jacky ? Amène-moi mes injections s’il-te-plaît…

Il se redresse et s’installe au bord du lit en esquissant une grimace douloureuse. Son dos et ses jambes le font souffrir depuis son opération. Le médecin l’avait prévenu… Certains préfèrent même parfois la paralysie tellement la douleur est atroce… Kim n’en est pas là… Après tout ça a ses avantages de tremper dans les trafics... La douleur passe avec les substances adaptées…

Jacky ouvre la porte, dépose un plateau à coté de Kim et va finalement se poster devant la baie vitrée.
Tu diminues dangereusement les périodes entre les injections…
Expliques donc ça à mes nerfs…

Le jeune homme attache l’élastique qui lui sert de garrot et récupère la seringue. Oui… Il sait très bien que ce ne sont plus des doses pour diminuer la douleur. Elles sont même trop importantes pour l’oublier. La spirale infernale est déjà bien avancée… ça lui fait un bien fou cette sensation juste après l’injection. Il plane ? Oui ça doit être ça. Finalement il comprend ses acheteurs. On oublie tout avec ça, même ce qu’on croyait ne pas pouvoir.

La seringue retombe sur le plateau en même temps que Kim sur son lit. Il reste ainsi sans bouger pendant un petit moment, les yeux fermés. Plus de douleurs, plus de pensées, plus rien.

Il inspire un grand coup et rouvre les yeux. Jacky le fixe tristement. Kim se détruit lentement mais surement. Et il ne peut rien y faire, on ne désobéit pas à Kim Young.
Le jeune homme détourne le regard.
Des nouvelles de Kwon ?
Pas depuis Singapour… J’espère qu’ils ne se sont pas fait arrêter. J’ai encore du mal à saisir le rôle de Lynn dans cette histoire…
Ils s’en sortiront… Je leur fait confiance à tous les deux.
Que les dieux entendent tes paroles…

Jacky esquisse un sourire. Ils n’avaient plus de dieux mais on espère toujours un miracle même quand on n’est pas croyant.
Il récupère le plateau et se dirige vers la sortie.

Jacky ?
Oui ?
Kim cherche ses mots. Ce rêve l’a perturbé. Mais peut-être ne s’agit-il que d’un rêve. Il avait pourtant l’air si réel…
Juliana t’a appelé dernièrement ?
L’homme se raidit à l’entente de ce prénom et se tourne vers Kim, étonné.
Inutile de mentir... Je veux juste savoir…
Jacky passe une main dans ses cheveux, baisse les yeux et finalement acquiesce.
Oui… Mais ça doit bientôt faire un mois. Ça avait l’air d’aller. Enfin c’est Juliana…
Elle n’a rien dit de spécial ?
Non… Elle aurait du ?
Je ne sais pas… J’ai un mauvais pressentiment…
Kim soupire, se frotte le menton plongé dans sa réflexion. Ses yeux fuient toujours à la recherche d’une réponse.
Et Park ? Rien à signaler ?
Park ? Il nous a purement et simplement oubliés… Tu le connais… Ce gamin est comme mon petit frère… Mais… Il a toujours voulu ce que tu avais… Il aimait Juliana… Il t’en a voulu de partir. Je ne pense pas qu’il ne nous aide à présent… Si quelque chose t’intrigue vraiment je peux faire ma petite enquête…

Kim détourne le regard et acquiesce… Il ne sait pas ce qu’il cherche et encore moins ce qu’il risque de trouver… Mais si les drogues font oublier la douleur, elles ne font rien face à l’obsession…

music


Directeur Young ?
Mm ?
Jacky a été abattu… Une balle en plein cœur…
Il releva la tête brusquement vers l’homme qui se tenait devant lui.
QUOI ?
Le père de votre femme, Lino Vanzetti… Abattu d’une balle en pleine tête… C’est arrivé dans la nuit.

Kim détourna le regard, et secoua la tête s’assurant qu’il avait bien compris cette fois…
Le père de Juliana…
Il fronça les sourcils. Il avait un peu de mal à assimiler les informations. Il se frotta les yeux comme pour essayer de sortir de sa léthargie.
Le commanditaire ?
Aucune piste pour l’instant. La méthode rappelle celle du basilic. A savoir si c’est réellement lui… Et si c’est le cas nous ne remonterons pas facilement à celui qui a fixé le contrat.
Bien… Et Choi ?
Il ne sort pas de sa villa, depuis son retour de chez votre femme. Peut-être cela vaut-il mieux pour lui…
Kim haussa un sourcil, intéressé par la remarque.
Continue…
Il a fait main basse sur tous les quartiers asiatiques à votre départ. Et sans la présence des Vanzetti, il aurait pu récupérer une partie des quartiers italiens et même le Bronx. La famille Vanzetti est une proie de choix pour ces vautours. Un meurtre de plus ou de moins… Votre femme risque très certainement d’être la suivante sur la liste.
Il n’y a aucune information sur ce « basilic » ?
Aucune, il fait trop bien son travail pour qu’on le débusque.

Sa mâchoire se crispa, il ne pouvait pas décemment attendre sans rien faire… Juliana restait la mère de son fils malgré tout…
Tant qu’elle reste dans l’enceinte de sa propriété, elle est en sécurité… L’enterrement de son père est prévu pour quand ?
D’ici deux jours je pense, le temps de faire revenir la famille.

Il passa une main sur son visage émacié et avala une gorgée d’Hennessy.
Dans ce cas tu sais ce qu’il reste à faire. Périmètre de sécurité habituel. Quadrillage des environs sur un kilomètre à la ronde. Et vous pointez tous les postes de tir alentour.
Il soupira.
Je ne peux rien faire de plus.
Vous n’assistez pas à…
Non. Juliana ne sais pas que je suis ici. Et il n’est pas encore temps…
Il coupa net sa phrase et jeta un regard à l’employé.
Tu peux disposer… Ho, une dernière chose… On continue, personne ne doit savoir que je suis ici.

Le jeune homme le salua et se retira du bureau sans bruit.
Kim, était plongé dans la contemplation du liquide ambré qui tanguait dans son verre. Il avait l’impression que sa tête allait exploser à force de tourner en rond dans ce bureau…
Une guerre des gangs étaient sur le point de débuter, et sa réapparition n’aurait pas arrangé les choses. Il fallait qu’il reprenne les rennes « en douceur » Et pour cela, l’anonymat et le silence restait sa meilleure option, pour l’instant.

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Quelques mois plus tôt à Séoul

Vas-tu voir Sun-Joo ?
Jacky s’arrêta instantanément et releva la tête. Kim le regardait, appuyé contre une colonne, tentant contre toute attente de tenir debout.
Tu devrais éviter d’insister. Le médecin l’a dit, tes muscles ne sont pas encore tout a fait en état.
Le jeune homme se laissa retomber sur le divan tout proche.

Tu n’as pas répondu à ma question…
Jacky acquiesçât et détourna le regard. Il y avait toujours eu cette distance d’habitude inexistante entre les deux hommes, dès que ce prénom était prononcé. Froideur complètement obsolète depuis toujours.

Kim n’avait pas plus de 18 ans quand Sun-Joo avait débarqué dans leur vie. C’était la fille d’un vieil ami de son oncle. Aussi loin qu’il s’en souvienne il était tombé amoureux d’elle dès qu’il l’avait vue, sagement assise sur une balancelle dans le jardin de l’ambassade. Pourtant il avait étouffé dans l’œuf ce sentiment quand il s’était aperçu que Jacky la regardait avec la même insistance que lui. C’était certainement la première fois qu’une femme retenait l’attention de son ami. Et c’était aussi toujours la même histoire avec Kim. Ce sens du sacrifice un peu trop développé pour un homme normalement constitué.
Il avait même fini par encourager Jacky, quoique le cœur serré. Et Kim et la jeune fille étaient finalement devenus de très bons amis, partageant la passion de la lecture et de la découverte.

En y repensant aujourd’hui, il était sûr d’avoir eu raison. Les deux jeunes gens s’entendaient parfaitement bien. Et même si cela faisait à présent trois bonnes années que Sun-Joo subissait avec plus ou moins de compréhension les pérégrinations de Jacky à travers le monde, personne ne doutait que s’il devait un jour s’arrêter ce ne serait que pour les beaux yeux de cette charmante coréenne.

Quant à cette impalpable distance qui s’instaurait entre les deux hommes à propos de Sun-Joo, c’était Jacky qui l’avait développée. Un peu de méfiance, face à un ami, certes, mais de 4 ans son cadet et qui partageait les mêmes centres d’intérêt que Sun.
Et puis il n’était pas idiot, si Kim avait remarqué le regard de Jacky, ce
dernier en avait fait de même au début, et si Kim ne lui avait pas clairement laissé la place, il aurait comme toujours baissé les yeux pour laisser passer le maître. Il y a encore un an il se demandait toujours si aucune ambigüité quant aux sentiments de ce trio malchanceux ne subsistait. Et puis il y avait eu Heaven Island, et Juliana. A présent ce n’était plus de la méfiance qui lui faisait garder cette distance. C’était la compassion. Il se reprochait presque d’être heureux tandis que Kim se détruisait lentement depuis leur retour. Alors il adoptait la même stratégie qui avait toujours été sienne. Faire comme si Sun-Joo n’existait pas. Il n’en parlait jamais, l’invitait encore moins et se faisait discret quant à ses sorties, un parfait célibataire aux yeux de tous et surtout de ceux de Kim.

Tu sais, tu ne dois pas t’en vouloir d’être heureux parce que je me cloître ici.
Kim esquissa un sourire à son ami et inspira profondément.
Passe le bonjour à Sun. Et rappelez-vous tous les deux que ce n’est absolument pas interdit qu’elle me rende visite.
Jacky passa une main dans ses cheveux et un sourire gêné se dessina sur ses lèvres.
Je suis idiot parfois…
Non amoureux… ça se pardonne parce que ça ne se soigne pas. Et sauves-toi tu vas finir par être en retard.
Le jeune homme esquissa un signe à Kim avant de sortir de la villa.


Jo entra dans le salon à cet instant.
Kim on a un problème.
Le jeune homme fronça les sourcils et dévisageât Jo, intrigué.
Quel genre de problème ? Et surtout… de quelle ampleur ?
Jo n’eut pas le temps de répondre à la question. Min-Ji déboula également dans le salon.
Kim tenta de se relever et finalement se retrouva une nouvelle fois dos à une colonne pour pouvoir tenir debout.
La jeune femme sans réfléchir se rua sur lui.
Tout est de ta faute !
Jo esquissa un geste pour la rattraper mais Kim l’arrêta en relevant la main. Et tandis que Min-Ji lui martelait le torse, il parlait silencieusement à Jo, lui demandant des explications.
C’est Jun ?
Jo acquiesçât. Et lui expliqua vaguement ce qui était arrivé. Apparemment l’échange prévu au large des côtes coréennes, avait très mal tourné. Et le speed boat avait disparu en mer tout comme son équipage.

Kim fit signe à l’homme de quitter la pièce.
Je te déteste ! C’est à cause de toi ! Je t’avais pourtant demandé de ne pas l’envoyer lui !
Ses coups avaient diminué de puissance, contrairement à ses sanglots devenus incontrôlables.
Il la saisi par les poignets, l’obligeant à le regarder.
Min-Ji. Min-Ji. Écoute-moi… C’est lui qui a voulu y aller. Il avait commencé les négociations. Il a voulu les terminer. Même si je l’en avait empêché… Que veux-tu que je fasse ? Tu m’a vu ? Je ne suis plus celui qui le mettait au tapis pour l’empêcher d’aller risquer sa vie n’importe comment…
La jeune femme se remit à pleurer de plus belle, accroché à Kim comme à une bouée de sauvetage. Il la serra dans ses bras, caressant ses cheveux, lui murmurant tout bas des mots rassurants pour la calmer.

D’un autre coté, ses jambes le faisaient terriblement souffrir et lentement il se laissa glisser le long de la colonne, emportant avec lui la jeune femme. Finalement il se retrouva assis à terre, Min-Ji toujours accrochée à lui. Elle se recroquevilla entre ses jambes, tandis qu’il lui chantonnait un vieil air que le père de Min-Ji sifflotait constamment de son vivant. Et quelques temps plus tard la jeune femme épuisée nerveusement sombra sur ce lit de fortune que formait le corps de Kim.

Il posa sa tête contre la colonne, fixant le plafond d’un air hagard. Ce monde avait un coté impitoyable qui commençait à l’épuiser bien plus qu’il ne pouvait en supporter. Il posa les yeux sur Min-Ji qui semblait si tranquille dans son sommeil. L’amour ça faisait toujours mal un jour où l’autre… Elle venait de l’apprendre à ses dépends. Il avait essayé de l’en protéger depuis toujours mais après tout il n’y avait rien de plus chaleureux que les sourires de Min-Ji quand elle parlait de Jun. Finalement c’était comme tout dans la vie. C’est toujours ce qui nous fait le plus de bien, qui nous fait le plus de mal…

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« Retourner en Corée n’est pas une bonne idée Kim… Si les familles apprennent que tu es toujours en vie... Je te laisse imaginer les conséquences… »
« Young Kim-Ho, il faut parfois savoir abandonner une idée fixe au risque de mourir… »
« Crois-tu que ça me fait plaisir d’en arriver là ? Crois tu que... Laisse tomber Kim... Tu ne vois même pas tout ce qu’on fait pour toi... »
« Tu sais parfois être aussi buté que ton père, mon garçon... Et ceci n’est pas un compliment... »

Toutes ces voix dans sa tête commençaient à lui donner le tournis. Ou était-ce l’alcool ? Peut être le mélange médicamenteux... La pièce tanguait dangereusement autour de lui... C’était comme s’il était emporté dans une valse entêtante sans pouvoir s’arrêter de son propre gré...

« Kim c’était un piège ! »
« Vous n’auriez pas du revenir M. Young »
« Je causerais votre perte à tous... »
« Pourquoi décidez-vous de la vie de tant de gens ? Pourquoi ? »
« C’était moi... ça devait être moi... »
« Kim... Tu es en train de... – de devenir fou... oui... »

Il étouffait à présent, il desserra le col de sa chemise, mais cela ne suffisait pas. L’oppression persistait. Il avala une rasade d’Hennessy. Il s’appuya sur le coin de son bureau pour ne pas perdre l’équilibre... Il cherchait quelque chose des yeux, mais ne trouvait rien... D’ailleurs sa vue commençait à se troubler...

« Si vous voulez qu’on arrête le massacre M. Young, il va falloir vous montrer coopératif... »
« Kim ? N’oublie pas une chose. Si tu cèdes nous sommes tous perdus... »
« Il y a trop de vies en jeu, pour qu’on te laisse à ces fils de chiens »

Arrêtez...
Il s’adressait à ces voix dans sa tête... Ou peut être avait-il vraiment l’impression que les personnes se tenaient réellement devant lui... Il jeta son verre, qui se brisa sur un mur, essayant de chasser ses démons, comme il le pouvait. Il se mit à déglutir difficilement, se raccrochant au bureau il ouvrit un tiroir. Un flacon de calmants. Il se disait que c’était la douleur qui le faisait délirer. Oui c’était ça. Pas d’autre explication. Une pilule, deux. Il les avale avec une gorgée d’alcool. Il n’a rien d’autre sous la main.

« Nous sommes arrivés trop tard... »
« Te vanter de ne pas être raisonnable, t’aura amené loin mon garçon... Bien plus que tu ne pouvais l’imaginer... Il est trop tard à présent... »
« On fait ce qu’on peut, jamais ce qu’on voudrait... Même toi Kim... Tu viens de l’apprendre à tes dépends... »

Il porte la main à son cœur. Il se contracte comme l’ensemble de ses muscles. Sa main qui s’appuyait sur sa canne, lâche prise. Il tombe à genou, suffocant comme si l’air n’atteignait plus ses poumons. Vérité ou simple tour de son esprit, il ne sait plus. Il ne ressent plus rien. Sa main remonte à sa gorge, et il s’effondre sur le coté sans connaissance.

Na-Yung, dans la pièce adjacente, a entendu le verre se briser, elle accourt.
Kim-Ho. Mon Dieu !
Et tandis qu’elle maintient sa tête pour ne pas qu’il s’étouffe plus, du bout des doigt elle tâtonne a l’aveuglette sur le bureau pour trouver le téléphone et branche le haut parleur avant de composer le numéro du médecin qu’elle connaît par cœur.
La sonnerie se déclenche, une, puis deux…
Kim-Ho respire ! S’il te plait!
Quand la voix du médecin se fait entendre elle a l’impression qu’une éternité s’est écoulée.
Vite je crois que Kim-Ho vient de faire une crise cardiaque.

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Quelques mois plus tôt, Séoul, Songpa-Gu*

Le plus dur entre deux prises ce n’est pas vraiment le manque… Contrairement à ce qu’on pourrait croire… En fait le plus dur, comme dans toute chose de la vie, c’est l’attente. Insupportable attente de la délivrance. L’attente de l’écolier en classe, du délinquant en prison, du patient dans le couloir de l’hôpital… L’attente qui précède la liberté et le cœur léger. Une fois dehors, une fois hors de toute pensée, on oublie tout. Tout ce qu’on a pu subir. Le mal, les déceptions, les humiliations. Plus rien d’autre que cette insaisissable liberté.

La tête trop lourde pour ses épaules retombe en arrière sur le fauteuil. Il ferme les yeux, tente de tenir le coup, un peu plus, un peu plus longtemps. Un soupir et finalement il abandonne. Il attrape ses béquilles et se relève lentement. Jacky ne répond pas, il va se débrouiller seul pour assouvir son sombre péché.

Il n’a pas fait la moitié du chemin du bureau que Jacky ouvre la porte visiblement ennuyé. Derrière lui la mère de Kwon s’époumonant pour voir Kim. Le jeune homme acquiesce et retourne s’installer derrière son bureau. La vie lui joue un mauvais tour de plus et décide de le faire languir un peu…

Madame ? Que puis-je pour vous ?
Que pouvez-vous pour moi ? Plus rien justement ! Je veux que vous laissiez ma famille tranquille ! Mon mari est mort pour votre père ! Mon fils est sur le même chemin ! Et maintenant ma fille ! Elle devient un instrument de mort par la faute de votre organisation ! Encore !
Attendez, je ne suis pas sur de comprendre. Jo Kwon-Ji est un de mes meilleurs éléments… Et vous avez toujours su depuis sa naissance qu’il était destiné à ça… On n’échappe pas à sa descendance… Mais je n’ai absolument aucune idée de la place de votre fille dans mes affaires.
Ce… Ce… Monstre ! Cette fille ! L’amie de Kwon-Ji !
Lynn…
Lynn ou ce que vous voudrez, je m’en fiche ! Elle a obligé mon bébé, Soo-Ji, à participer à toute cette mascarade ! Jamais elle ne s’en remettra ! Et si Kwon-Ji n’avait pas travaillé pour vous, nous n’en serions pas là !
La mère de Kwon continuait à déverser son flot incessant de menaces contre Kim et sa famille.
Il n’arrivait plus vraiment à suivre… Les premières manifestations physiques de sa dépendance pointaient leur nez… Déjà la sueur dégoulinait à ses tempes et le long de son dos. Déjà, il perdait pied au milieu de toutes ses pensées incontrôlables qui reprenaient le dessus dès qu’il ne tenait plus.

La respiration qui s’accélère, le corps qui ne répond plus aussi bien, la vue qui se trouble, la concentration qui n’est plus qu’un lointain rêve.
Votre oncle l’honorable Sei Il-Kwon lui est un homme respectable ! Contrairement à votre père ou vous ! Vous êtes la honte de la famille Young Kim-Ho !

La patience qui suit lentement le même chemin des nerfs qui ont déjà lâché, il y a quelques minutes… Les yeux qui s’embrument jusqu’à ne plus vraiment distinguer à qui il s’adresse.
Et essoufflé, d’une voix tremblotante et un peu plus aigue qu’il ne voudrait, il prononce la sentence qu’il s’était promis d’éviter à tout jamais.
Votre famille ne survit depuis des années que grâce à la mienne… Vous avez perdu votre mari, certes. Mais vous rappelez vous que si vos enfants sont aujourd’hui diplômés, et ont une situation stable c’est grâce à mon père et moi… Mon oncle n’est qu’un politicien un peu moins véreux que les autres… Il n’a aucune idée de la misère qui peut exister dans ce pays. Il ne vous adresserait même pas la parole, si votre mari et maintenant votre fils n’avaient pas été au service de ma famille…

Son poing se resserre autour de l’accoudoir de sa chaise à s’en blanchir les phalanges… Une lutte intestine terrible lui noue les entrailles… Pourquoi ne contrôle-t-il plus rien de ses émotions…
Vous rappelez vous de votre vie avant que votre mari n’entre dans mon organisation ? Vous souvenez vous dans quel quartier de Séoul, mon père a-t-il trouvé le père de Kwon-Ji ? S’il n’était pas mort en service pour nous, ce serait certainement son alcoolisme débutant qui l’aurait achevé !

Kim ! Ça suffit !
La voix de Jacky l’a coupé net dans son emportement. Il le dévisage la tête penchée sur un coté. Et lentement se reprend, et sa conception de la réalité revient juste assez pour s’apercevoir de ce qu’il vient de faire.
Il tourne les yeux vers la mère de Kwon, et aussitôt les baisse par respect et peut être aussi par stupeur.
Ce n’est plus une mère emportée par la rage qui se tient au milieu de son bureau. Mais une femme brisée par les paroles de ce jeune homme qui lui rappelle combien sa vie peut être pitoyable et inutile depuis le début…

Que vient-il de faire… Il s’était promis de ne jamais en arriver là. Sa vie ne vaut pas mieux que celle d’un autre. Sauf que l’argent et la société qu’il dirige en a décidé autrement. Et lui faisait à présent partie de cette sphère élitiste qui se permettait de choisir qui avait le droit de vivre ou non… Se prendre pour Dieu n’est pas donné à tout le monde. Et ce pouvoir fait aussi mal à son possesseur qu’à ceux qui l’entourent.

Dans son emportement il s’est levé, oubliant la douleur de ses jambes. Lourdement il retombe dans son fauteuil, et détourne un regard empli de désespoir. Il fronce les sourcils, ferme les yeux, sa mâchoire se crispe. Et si tout cela n’était qu’un mauvais rêve… Mais la voix de la mère de Kwon le ramène à la douloureuse réalité.
Pourquoi ? Pourquoi décidez-vous ainsi pour la vie de tant de gens ?

Le jeune homme la regarde, désemparé. Que pourrait-il lui répondre alors que lui-même se pose la question… Elle n’aura pour seule et unique réponse qu’un faible et à peine audible,
Je suis désolé… Sincèrement. Je… Ne peux rien pour vous. Votre fille sera suivie par notre psychologue pour s’assurer qu’elle n’ait pas de séquelles trop importantes. Et nous retrouverons Kwon-Ji… Je vous le promets.

Elle acquiesce, encore déstabilisée par la réaction du jeune homme quelques instants plutôt et tourne la tête vers Jacky comme pour lui demander ce qu’elle doit faire ensuite. Il se rapproche d’elle et la raccompagne vers la sortie, un bras protecteur autour de ses épaules.

Quand il revient quelques minutes plus tard dans le bureau, il trouve Kim en proie à des sanglots incontrôlables… Le visage dans les mains, recroquevillé sur lui-même comme un enfant apeuré.
Kim il faut que tu te soignes... Mais plus comme ça… Tu es en train…
De devenir fou… Tu peux le dire…
Le jeune homme émet un rire cynique.
Je suis incapable de me contrôler. Je ne suis même pas sûr de pouvoir encore diriger l’organisation. Pourquoi c’est si dur ? Tout aurait pu être plus simple si…

Cette phrase qui revenait sans cesse depuis tant de temps, mais qui jamais ne trouvait de suite. Il sent la main de Jacky sur son épaule. Sa poigne se resserre comme pour lui montrer son soutien. Mais ce n’est plus de soutien dont il a besoin… C’est d’un espoir… Ou une raison de s’en sortir…


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*Arrondissement chic de Séoul (site officiel)

Music


Allongé sur le divan de son bureau, le bras replié en travers du visage, il attend.
Les murmures de Na-yung et du médecin lui parviennent de l’autre pièce.
Rien de bien grave en fait. Il a juste fait eu un bronchospasme. C’est pour ça qu’il ne respirait presque plus.
Et on fait quoi pour éviter une « rechute »
Il faut qu’il arrête les interactions médicamenteuses... Sans compter l’alcool. On le déclarerait à tendance suicidaire chez mes confrères psychiatres...
Elle soupire sachant déjà que le combat est perdu d’avance. Il n’en fait qu’à sa tête.
Ok. Je me charge de lui. Tu peux rentrer.
Bonne soirée. Tu m’appelles si quelque chose se dégrade.
Oui, ne t’en fais pas. A plus tard.

La porte se referme et les pas de la jeune femme se rapprochent lentement du bureau. Kim ferme les yeux. Il n’a pas envie de discuter et encore moins d’entendre des reproches.
Kim-Ho ?
Il ne répond pas. Il va l’ignorer comme toujours, jusqu’à ce qu’usée d’attendre elle sorte de son propre chef.
Je sais très bien que tu ne dors pas. Je n’ai pas envie de m’attarder sur quelque sujet que ce soit... Mais à choisir entre attendre inutilement et rester cloitré ici, ou rentrer à New-York... Le choix est très vite fait, en ce qui me concerne.
Il baisse son bras et la dévisage las.
Justement. Cela ne te concerne pas.
Elle reste sans voix quelques instants. Elle est en train de regretter de plus en plus d’avoir sorti ce magazine. S’il n’avait rien su, ils ne seraient pas venus s’enterrer ici...

Si tu n’a rien de plus utile à me dire, je te demanderais de me laisser seul.
Elle fronce les sourcils et se mord la lèvre. L’atteindre devient de plus en plus difficile. Il se fiche de tout ce qui l’entoure. Il ne réagit même pas en ce qui concerne son fils ou sa femme. Il n’est plus un homme, tout juste une machine dénuée de sentiment qui tente tant bien que mal de continuer à fonctionner malgré tout.

Si tu cherches à mourir seul, tu es en très bonne voie. Ce qui est arrivé au pays, c’est du passé ! Tu ne peux plus revenir sur ça ! Alors avance au lieu de ramper.
Il ne détourne même pas les yeux. Il la fixe d’un air indifférent, légèrement ennuyé qu’elle ne soit pas encore sortie.
La porte est sur ta droite.

Elle enrage littéralement. Les poings serrés, les bras le long du corps. Elle voudrait le gifler, lui hurler dessus, le faire réagir d’une façon ou d’une autre. Elle n’y arrivera pas, et finalement ressort de la pièce, furieuse, en claquant la porte.

Kim se relève et s’assoit sur le divan. Il tient sa tête entre ses deux mains, les coudes posés sur les genoux. Il a encore mal au crâne. Il faut dire que ce n’est pas évident à gérer des dizaines de voix à l’intérieur. Il frotte machinalement son front du bout des doigts et soupire.

Il attrape sa canne, se relève et se dirige vers son bureau. Il décroche le combiné du téléphone et compose un numéro. Il relève la tête et fixe l’horizon d’un œil distrait. Avant de raccrocher machinalement. Na-Yung avait raison. Il n’y avait plus rien pour lui là bas à présent... Plus rien que des remords...

Quelques mois plus tôt, Séoul, Songpa-Gu, Young Towers.


Tu crois sincèrement que tu pourras me rattraper quand mes jambes accepteront de me porter comme avant ?
Jacky bascula le fauteuil de Kim en arrière pour passer la marche de l’entrée des bureaux.
Je ne crois pas… J’en suis certain. Ce n’est pas parce que ton père a soudoyé l’armée que tu as échappé au service c’est juste parce que tu étais inapte !
Kim éclata de rire.
Tu sais que tu es marrant quand tu veux ! Mais ne fais pas le malin ! Car c’est aussi mon père qui a payé la tienne d’exemption !

Une jeune secrétaire vint se planter devant les deux hommes les coupant dans leur conversation.
Directeur Young, bonjour. Vous avez reçu un appel il y a quelques minutes. Il s’agissait d’un certain M. Jung. Il n’a pas donné de motif mais voudrait que vous le rappeliez au plus vite.
Jung ?
Kim fronça les sourcils et les deux hommes échangèrent un regard inquiet.
Merci. Rappelez-le et passez-moi la communication dans mon bureau.
La jeune femme s’inclina et disparut derrière son office.

Tu crois que c’est à cause de la transaction de Jun ?
Je ne crois pas… J’en suis certain.
Kim décrocha le combiné et mit le haut parleur.
Mr. Young ! Enfin ! Il est difficile de vous joindre ces temps ci ! Serait-ce parce que ma marchandise s’est volatilisée en pleine mer jaune ?
Je vous rappelle que votre marchandise dort au fond de l’océan avec deux de mes hommes… Sans compter l’argent que j’ai également perdu…
Vous vouliez ne prendre aucun risque… C’est bien. Nous avons tout perdu !
La mâchoire de Kim se crispa. Le ton ironique et plus que moqueur de cet homme l’agaçait.
Que puis-je donc pour vous ?
Pour moi ! Plus grand-chose apparemment ! Vous m’avez fait perdre des millions ! Je viens de rater un marché sur l’Europe ! Je vous assure que tout ça ne restera pas sans conséquence M. Young. Surveillez mieux vos transactions la prochaine fois !

Kim coupa le téléphone, détourna le regard de l’appareil et finalement balaya rageusement d’un revers le dessus du bureau.
Tout va de travers !
Il se frottait le menton avec insistance. Il fallait qu’il se calme.
Qu’est ce qu’on fait ?
Kim releva la tête presque surpris d’entendre la voix de Jacky.
On attend les plongeurs.
Il se tourna vers la fenêtre et observa la ville qui grouillait quelques centaines de mètres plus bas.

Comment va Jun ?
Min-Ji s’occupe de lui… Il ne va pas trop mal pour quelqu’un qui a passé trois jours accroché à une planche dans une mer démontée… Cho l’a surnommé Moïse…
C’est bien… Jacky ?
Mmmh ?
J’ai un mauvais pressentiment…
Un de plus ?

Il tourna la tête vers son ami et esquissa un petit sourire forcé.
Des tas de choses changent… J’ai l’impression d’avoir perdu le contrôle de ma vie… Mais mes intuitions me trompent toujours aussi rarement… Quelque chose va arriver… Je le sens… Il faut que nous fassions attention…
Le téléphone se remit à sonner. Kim décrocha.
Oui… Comment cela ? Il y a combien de temps ? J’arrive tout de suite…
Il lança un regard à Jacky, le souffle coupé parce qu’on venait de lui apprendre. Il n’arrivait pas à articuler un mot.
Qu’y a-t-il ?
Kim baissa les yeux, bouche bée, cherchant ses mots.
C’est… Phil-soon… Il a été abattu… En pleine rue…
Jacky écarquilla les yeux, la nouvelle lui faisait l’effet d’une douche glaciale.
Tu avais raison… Je n’aurais jamais du revenir… Je suis en train de causer votre perte à tous…
Ne dis pas ça…
Mais tous les deux savaient à présent qu’il n’aurait jamais du revenir…
Il faut qu’on y aille…
Il inspira douloureusement, son regard fuyait celui de Jacky, comme s’il ne voulait pas risquer d’y voir un reproche…
J’appelle une escorte supplémentaire. On ne doit plus sortir seuls.
Kim acquiesçât tandis que Jacky composait un numéro et réquisitionnait du personnel supplémentaire.



Dix minutes plus tard, Kim la tête appuyé contre la vitre blindée d’un SUV,
tentait comme il pouvait de rassembler ce qui lui restait de raison pour
résister à ce nouveau coup du sort…

Qu’est-ce que je dois décider ?
Kim…
Il vaut peut être mieux que je m’en aille…
Kim…
Il faut parfois avouer ses torts…
Kim…
Rappelle-moi d’arrêter de n’en faire qu’à ma tête…
Kim…
Je pense que…
KIM ! On a un problème !
Quoi ?

Le jeune homme sortait enfin de ses pensées pour se rendre compte que Jacky tentait de lui montrer quelque chose.

Regarde derrière on a perdu le premier suiveur il y a trois minutes, il n’a pas pu se déporter pour nous suivre… Le deuxième vient d’être arrêté il n’a pas pu se défiler…

Jacky crispa les mains sur le volant essayant tant bien que mal de ne pas s’éloigner des deux éclaireurs…

Je crois que le meurtre de Phil-Soon était un appât pour nous faire sortir… Kim ! C’était un piège !

http://www.esnips.com/doc/e191874b-2e41-4efa-9eb5-1b3343ea3073/30-seconds-to-mars---savior

Un cri, un tir, une balle qui traverse son champ de vision. Il a tout juste le temps de se laisser tomber en arrière pour l’éviter. Pourtant il la sent effleurer une tempe. Le sang qui ne tarde pas à brouiller une partie de sa vue lui confirme que la douleur n’est pas le fruit de son imagination.
Il se redresse juste assez pour voir Jacky traverser le corridor et abattre deux hommes de plus.

La grenade qu’il a balancé quelques minutes plus tôt a eu des effets dévastateurs sur les troupes ennemies. Si les hurlements et les gémissements inhumains ne sont pas là pour les convaincre, il y a encore la puanteur à peine supportable de la chair brûlée pour en témoigner.

Il s’essuie le visage du revers de la main. Jacky lui fait signe qu’il est prêt. Il se tourne vers la balustrade et cherche les derniers embusqués. Si leurs comptes sont bons, ils en ont déjà abattu au moins cinq, il doit en rester à peine autant. Kim se penche en avant pour jeter un œil à travers la balustrade. Il n’y a plus aucun bruit que le crépitement de l’incendie déclenché par l’explosion.

Une ombre se glisse derrière Jacky. Il ne la voit pas trop occupé à recharger son arme. Un revolver est pointé sur la base de son crâne. Le coup sera fatal. Un déclic, le léger bruit de la détente qui bute contre l’arme. Et la balle qui pénètre le corps dans un bruit spongieux. Il tombe à terre sans avoir vu venir la mort.

Jacky se retourne surpris. Il fixe l’homme avant de relever les yeux vers Kim., le canon de son arme encore fumant. Il hausse un sourcil et éclate de rire.
Merci !
Kim sourit à son tour. Ils sont sur un terrain de jeu, celui de la mort, certes, mais le leur aussi. Ils s’en sortiront ou mourront fiers d’avoir résisté jusqu’au bout.

Jacky lance un chargeur à son ami. Il va en avoir besoin. Les derniers sont bien cachés. Il lui fait signe qu’il n’en reste que trois normalement. Trois et ils ont une chance de se tirer de là dans un état encore acceptable.

Kim se redresse et s’aide des caisses derrière lesquelles il se cache pour se mettre debout. Il aura une meilleure vision que recroquevillé à terre. Jacky qui crie, il se tourne vers lui et le voit tendre une main vers lui. Il n’a pas le temps de comprendre, que déjà il sent le métal froid qui lui explose l’homoplate gauche.
Pendant qu’il chute, son esprit se rend enfin compte qu’il vient de prendre une balle. Jacky abat le tireur embusqué et rampe jusqu’à Kim. Celui-ci déglutit et secoue la tête pour ne pas perdre conscience.
Ça fait un mal de chien et il ne peut s’empêcher de crisper tout son
visage quand Jacky lui asperge l’épaule d’alcool. Il lui fait un rapide garrot.
Mais la blessure devrait être comprimée pour stopper l’hémorragie. Et là tout de suite, il n’a pas vraiment le temps pour ça.

Il en reste deux... Je m’en charge... Tu restes ici...
Kim se tient l’épaule il n’a pu qu’acquiescer, serrant les dents pour ne pas hurler. Sans compter que respirer devient une épreuve à elle seule. Entre l’odeur acre de la sueur, la pestilence de la fumée humaine et le goût métallique du sang plein la bouche, il n’a qu’une envie, se sortir de là au plus vite...

Un autre coup de feu, le hurlement qui suit, confirme qu’il y en a un de moins... Quelques secondes de silence... Un corps qui tombe de plusieurs mètres et s’écrase lourdement au sol. Kim fronce les sourcils en entendant le craquement mat de la nuque qui vient de se briser sous l’impact.

Il faut être initié pour supporter ce qui les entoure, mais ils le savent, ils doivent garder leur sang froid, ou c’est leur corps tout entier qui se retrouvera froid au fond d’une morgue dans quelques heures.

Il entend des pas, récupère son arme et la serre contre lui, luttant toujours pour ne pas tomber inconscient... La douleur lancinante, le sang qui envahi ses vêtements, son corps poisseux. Il ne va pas tenir... Il faut qu’il tienne. Sa vue se trouble mais il secoue la tête pour se remettre d’aplomb.
Jacky arrive.
C’est bon. Ils sont tous morts. On peut y aller.
Il fait pression sur son épaule, le relève et le maintient fermement contre lui. Kim a perdu trop de sang pour pouvoir se déplacer seul.

Une nouvelle détonation. Kim penche la tête en arrière, surpris. Jacky le fixe, les yeux écarquillés, il relâche la pression de l’épaule, sa poigne se desserre du bras. Kim n’a pas le temps d’esquisser un geste pour le rattraper et le voit passer par-dessus la balustrade. Le jeune homme titubant fixe d’un œil hagard, celui qui vient de tirer. Il l’abat froidement d’une balle en pleine tête avant de retomber en arrière sous la pression de la décharge.

NON !
Kim se réveille en sursaut, haletant. Il est comme devenu fou, cherche un repère, un visage familier. Mais il n’y a plus personne dans ce bureau. Il est seul depuis plusieurs heures.

Il se laisse retomber au fond de son fauteuil, et tente de calmer sa respiration...
Ce n’était qu’un rêve.... Ce n’était qu’un rêve...
Essaie-t-il de se convaincre ? Ou a-t-il perdu la raison au point de douter de son esprit ?

Il se penche vers le bureau, les coudes posés, se frottant les yeux vigoureusement. Quand il les rouvre, il les pose sur une carte que lui a déposée Na-Yung, plus tôt.

Juliana Vanzetti, sa famille et ses proches vous convient au baptême de Jae-Min.

Vanzetti... Hum...
Il émet un petit rire sarcastique...
Young n’est plus... Bientôt ce sera Choi...

Il avale d’un trait son verre de cognac et le frappe à plat contre le bureau... Il serre les dents sous l’effet de l’alcool et crispe sa main sur le verre qui finit brisé dans un éclat sourd. Et il reste ainsi, les yeux dans le vide, le sang s’écoulant lentement de l’intérieur de ses phalanges... Son esprit est déjà loin, certainement reparti se cacher dans les méandres de sa folie.

Music

Quelques mois plus tôt, Corée du sud, Incheon, zone industrielle portuaire.

Quelques heures déjà depuis qu’ils avaient du quitter l’autoroute forcés par une nouvelle escorte.
Quelques heures déjà depuis que Jacky avait trainé Kim dans cet entrepôt désaffecté pour se débarrasser des poursuivants puisque les semer était impossible.
Presqu’une heure déjà qu’ils avaient abattu le dernier.
Presqu’une heure déjà que Jacky avait basculé par-dessus la balustrade et qu’il s’était brisé la jambe et même plus, et même trop... Trop pour pouvoir s’en sortir indemne...
Presqu’une heure déjà qu’ils perdaient tout deux leur sang et que la raison les quittait lentement...

Kim ?
Mmm ?
Qu’est ce que tu fous encore là…
Je veille sur toi, ça ne se voit pas ?
Tu pourrais au moins attendre que je sois mort…
Je le serais surement moi aussi alors autant prendre les devants…

Kim ? Faudra que je te le dise combien de fois de te tirer de là ?
Et comment tu veux que je fasse ça ? Je te rappelle que je sors tout juste de paraplégie…
Mmm… C’est une bonne excuse pour y rester ça…
Bon tu peux me dire ce que tu cherches là ?
Ce que je réitère depuis une près d’une demi-heure… File-moi ce flingue et tire toi !
Mmmm…
Le jeune homme referma les yeux et se pelotonna un peu plus contre le mur…

Kim... Tu es le seul à pouvoir m’aider à présent...
Kim releva la tête pour être sûr de ce qu’il venait d’entendre...
Jacky tendit une main vers lui... Et ses mots le frappèrent de plein fouet...
Donne-le moi....

Le jeune homme fixa Jacky, les sourcils froncés comme s’il venait de voir un fantôme. Il secoua la tête et ferma les yeux comme pour chasser cette image de sa tête.
Un autre lieu… Deux autres vies… Et pourtant la même situation… Il fronça les sourcils, referma les yeux. C’est comme s’il nageait en plein délire.

Jacky posait sur lui un regard emprunt d’une grande lassitude... La clé de la seule délivrance qu’il pouvait encore espérer se tenait dans la main de Kim.... Il ne pouvait pas l’atteindre seul...

Dans des gestes d’automates, Kim releva le revolver et le chargea... Il n’arrivait plus vraiment à contrôler ce qu’il faisait…
Jacky lui adressait un sourire... Il le libérerait enfin... Kim souriait apaisé… Il allait enfin être délivré de toute cette vie…

Son ami lui tendit la main mais il ne lâcha pas l’arme... Complètement perdu, Il le regardait indécis...

A nouveau il ferma les yeux… Il n’arrivait plus vraiment à distinguer le visage de Jacky… Il lui semblait même qu’il regardait un miroir…
Finalement, il braqua l’arme sur lui... Dans son degré de folie, il se disait qu’il réparait ses erreurs...

Kim ferma les yeux...
Tu sais… Je t’ai toujours aimé comme mon frère…
Jacky lui lança un dernier regard et lui sourit...
Je sais... c’est pour ça que je ne peux le demander qu’à toi...

*Je t’aime…
Un sourire sur ses lèvres…
Je sais, moi aussi… Je t’aime…*
Il releva la tête cherchant d’où pouvaient venir ces voix…

Il reposa les yeux sur l’homme en face de lui... Le souffle coupé, il eut un mouvement de recul. C’était lui-même qu’il voyait baignant dans une mare de sang face à lui…

Une explosion à ses tempes, le ramenant à la réalité...ébranlant toutes ses certitudes....
L'arme trembla à nouveau avant de tomber lourdement sur le sol.....
Il soupira, la mâchoire crispée et les sourcils froncés... Son dernier espoir venait de s'envoler... Une fois de plus il avait raté son but… Mais… Quand il rouvrit les yeux…

C’était terminé… Jacky était étendu face à lui, une balle en plein cœur.
Il se dégagea du corps de son ami, se trainant loin de lui, loin de ce qu’il venait d’accomplir, loin de ce meurtre impensable… Il se retrouva dos à un mur, fixant d’un air hagard le corps qui gisait à quelques centimètres de lui…
Il hurla. La complainte fut longue. Il hurla comme le loup à la mort… La mort d’un des siens… La mort d’un frère…
C’était moi… ça devait être moi… Qu’est ce qu’il s’est passé...
Il se laissa retomber sur le côté se recroquevillant sur lui-même… Il ne sentait plus la douleur de ses blessures… Il oubliait que lui aussi risquait sa vie… Il n’y avait plus rien que ce corps face à lui… Cette vie, qu’il venait de briser… sa vie, qu’ils venaient de détruire…
Et la promesse silencieuse faite à Jacky le ramena à la réalité… Il devait s’en sortir… Il devait oublier les dernières minutes qui venaient de s’écouler, les ranger dans un coin de son esprit et ne plus y penser… Il devait… Mais pourrait-il ?

Il se traina jusqu’à l’extérieur du hangar, ses jambes refusant de le porter plus de quelques pas sans aide… Il rampa et se retrouva dans une ruelle sombre. Les lumières de la ville semblaient inaccessibles de là où il était… Et son corps lui rappelait maintenant qu’il était douloureusement en danger… Il s’était vidé d’assez de sang pour perdre connaissance d’une minute à l’autre…
Des phares. Quelqu’un approchait… Mais ainsi allongé dans le noir, personne ne le trouverait… Il s’accrocha aux caisses qui trainaient dans la ruelle pour tenter de se mettre debout… Et tandis qu’il se redressait et apparaissait maintenant clairement, il se rendit compte que finalement ce n’était peut être pas de l’aide qui arrivait…

Le voilà, c’est bien lui !
Il tendit un bras en travers de son visage pour distinguer les arrivants à travers la lumière des phares… Finalement il ne tiendrait peut être pas sa promesse…
Kim !
Jo le rattrapa de justesse alors qu’il perdait connaissance.
Kim ! On n’arrivait pas à vous localiser ! Il avait tout brouillé !
Jacky…
C’est tout ce qu’il put articuler avant de sombrer…